L’Azuré de l’Atlas
L’Azuré de l’Atlas
(Sous-genre Plebicula)
Polyommatus atlanticus
L’Azuré de l’Atlas
Origine et répartition
Endémique nord-africain.
Maroc et Algérie.
Type
Lycaena hylas atlantica Elwes, 1905 ; LT : Imentalla, Haut Atlas (Maroc).
Taxinomie marocaine et identification
Polyommatus atlanticus atlanticus (Elwes, 1905) ; LT : Imentalla, Haut Atlas (Maroc).
Vicariant maghrébin du groupe de Polyommatus (Plebicula) dorylas Denis & Schiffermüller (comprenant P. golgus Hübner, P. sagratrox Aistleitner, P. nivescens Keferstein).
Mâle : aile antérieure 14-17 mm. Face dorsale bleu céleste pâle et resplendissant, largement (1 mm) bordé de noir, avec une petite série de macules rondes et noires dans la zone submarginale des postérieures, quelques fois agrémentées d’écailles oranges (f. ind. rosea Tennent). Belle frange blanche immaculée. Face ventrale gris ocré avec un graphisme très frappant de points noirs ocellés de blanc, gros à très gros aux antérieures, disposés en rangée incurvée et rayonnant par rapport au point discal. Des petites lunules oranges plus ou moins marquées sont adossées à la bordure marginale blanchâtre. Les postérieures supportent une ponctuation plus discrète et une strie distale blanche, légèrement triangulaire, qui s’exprime très largement. La femelle est particulièrement remarquable et attractive, revêtue de brun chocolat subtilement suffusé d’orange, et bordée aux quatre ailes d’amples bandes submarginales orange qui peuvent gagner partiellement l’aire postmédiane. C’est la femelle « la plus orange » des Polyommatus marocains à femelle brune. Identique à celui du mâle, le revers de la femelle offre un meilleur développement des lunules oranges. La magnificence de ce Lycène est de tout premier ordre.
Les exemplaires d’été sont d’envergure moindre.
P. atlanticus weissi Dujardin, 1977 ; LT : Col du Zad et Dayet Hachlaf, Moyen Atlas (Maroc).
Diffère par une taille légèrement plus modeste, ainsi que par la couleur du fond alaire ventral plus terne et grisâtre, éteint, moins chaud et moins ocré, la frange marginale blanche bien moins délimitée par les chevrons oranges devenus flous. Le bleu de la face dorsale est comme chez la forme nominative, peut-être un peu moins céleste. Chez la femelle, la bande orange submarginale est très exagérée par rapport aux sujets du Haut Atlas, le bel orange pouvant gagner l’aire postmédiane et partiellement l’aire discale des antérieures par une suffusion étale qui tend à teindre tout le dessus alaire chez les sujets les plus extrêmes et ainsi remarquables puisque la macule discoïdale noire apparaît alors sur le fond devenu orange ! Chez de telles femelles, les ailes postérieures présentent des lunules oranges marginales confluentes qui s’étendent vers le disque et peuvent occuper le quart de la largeur de l’aile. Il existe paradoxalement de rarissimes femelles démunies aux ailes postérieures de cette large bande submarginale orange. P. atlanticus weissi est donc caractérisé par un revers éteint et par la luxuriance du recto alaire des femelles dont l’orange est exagéré.
Les sujets émanant de la génération estivale sont de taille très inférieure (aile antérieure du mâle : 13-14 mm).
Au sein des variations individuelles, on enregistre de nombreux sujets au graphisme obsolète au verso des postérieures, ainsi que des formes fantaisistes dont les ponts noirs du revers des antérieures sont atteints de gigantisme ou ont pris une forme ovoïde originale.
Distribution au Maroc
La ssp. atlanticus peuple le Haut Atlas centro-méridional : M’Goun, Toubkal (notamment les secteurs de l’Adrar Tizerag, de l’Oukaïmeden et de Tacheddirt), Tizi-n-Test (colonie détruite), soient des habitats qui s’encartent dans l’écorégion des steppes atlasiques des hautes altitudes du bioclimat subhumide très froid, à enneigement important. Sur sols calcaires, parfois gréseux. 1700-3000 m.
La ssp. weissi habite le Rif centro-occidental : Tidiquin, Lakraa, Tisouka ; le Moyen Atlas : Bou-Iblane, région d’Ifrane (colonies éteintes ou en grave déclin), région de Timhadite, Inifife, Col du Zad, Tizi-n-Senouane, région d’Itzer, Tizi-Taghzeft (éteint) ; le Haut Atlas oriental : Tizi-n-Talrhemt ; soient des habitats soumis au Maroc des forêts humides du bioclimat humide froid à très froid, à enneigement très fréquent. Uniquement sur substrat foncièrement calcaire. 1300-2200 m. L’énumération de ses localités récemment détruites serait plus longue que celle des sites où il subsiste.
Cartographie
Nombre de mailles : 16.
Plantes-hôtes et sources nectarifères
Monophage sur Anthyllis vulneraria et A. polycephala (Fabaceae).
L’adulte puise de préférence le nectar de son Vulnéraire nourricier, mais fréquente les floraisons de très nombreuses plantes de son habitat, notamment certaines Scabieuses. La présence d’un Roncier en fleurs peut attirer de nombreux spécimens, notamment des femelles. Egalement très adepte des flaques boueuses des chemins et des rives humides des ruisseaux où il se regroupe pour s’abreuver et puiser des sels.
Types d’habitats, conservation et attributions bioindicatives
Flancs écorchés, lisières et clairières lapilleuses et très ensoleillées, ravins et barrancos, de préférences dans les écorégions à forêts humides (chênaies claires, sapinières, cédraies, thuriféraies) de l’étage montagnard méditerranéen. Cette splendide espèce craint d’autant plus le piétinement et la pression pastorale que sa plante est très prisée par le cheptel qui se délecte des têtes pédonculées dès leurs émergences. Espèce intolérante et fuyant les milieux arasés, l’Azuré de l’Atlas n’a subsisté jusqu’il y a peu qu’à la faveur de secteurs protégés (la plupart périmètres de reboisement). Il vient de connaître une régression alarmante suite au laxisme suscité par les récentes années de sécheresse récurrente et à la pénétration stupidement tolérée du bétail dans ces secteurs en régénération. Une recolonisation de certains sites est parfaitement possible si un répit est accordé à la plante. La raréfaction fut notamment prononcée dans la région d’Ifrane (les anciennes stations mitoyennes des dayas ont été saccagées par un usage pastoral irrationnel) et du Haut Atlas centro-méridional dont l’ancienne population du Tizi-n-Test (encore très dynamique jusqu’au milieu des années 90), à l’habitat quotidiennement laminé par les Chèvres depuis une dizaine d’années, n’est sans doute plus récupérable.
Endémique maghrébin de valeur cardinale, ce Papillon revêt toutes les qualités pour servir à des diagnostics de surveillance de la qualité du milieu herbacé, tant forestier en moyenne montagne que pastoral au niveau altimontain (conservation du substrat végétal). Ce serait aussi un excellent témoin pour évaluer sur une décennie les indices objectifs de transformation de nouveaux espaces conservatoires et de reconquête par la flore (le pouvoir germinatif des graines est de plusieurs décennies).
Phénologie
Digoneutique : mai-juin et août.
Vol
Extrêmement preste et vif (notamment sous l’effet des ardeurs solaires auxquelles il ne renonce pas), survolant en zigzags et à peu de hauteur les pans de Vulnéraires où le mâle recherche les femelles naissantes, ou d’une fleur à une autre pour butiner. Affectionne le calcaire très blanc des bermes de route, des fonds de ravins et des lits d’oueds secs où le mâle territorialiste s’approprie un repaire (caillou, branche) qu’il défend et où il reste longtemps posé ailes ouvertes en plein soleil. Très casanière et demeurant au sein des massifs de la plante-hôte, la femelle possède un vol peu alerte.
Stades pré-imaginaux
Cycle biologique et stades méconnus. Les larves des autres Plebicula sont vertes, se nourrissent de pousses de la plante ou en sont même semi-endophytes (P. nivescens), hivernent et manifestent une myrmécophilie modérée.
Identité éco-éthologique
Stènoèce, xérothermophile, héliophile, rupicole, montigène-altimontain, probablement myrmécophile, territorialiste (mâle percheur), opportuniste.
Etat de connaissance et statut conservatoire
Moyen.
Quasiment éteint dans le Haut Atlas, en grand danger dans le Moyen Atlas et le Rif.