La Sésie Frelon
La Sésie Frelon
Sesia apiformis
LE PAPILLON QUI SE PRENAIT POUR UN FRELON !
Le « Papillon frelon » ou Sesia apiformis, est un papillon à corps épais qui à première vue pourrait être confondu avec le Frelon, insecte hyménoptère dont le dard est redouté autant de ses prédateurs potentiels que des humains.
C’est par sélection naturelle qu’au fil du temps et de mutation en mutations que les Sésies du peuplier les plus ressemblantes à cet hyménoptère « piqueur » ont progressivement été sélectionnées par la Nature, donnant à l’insecte cet habitus noir et jaune dit « aposématique » qui lui sauve sans doute souvent la vie. Plus d’un oiseau doit avoir hésité avant d’en faire son repas de crainte du dard virtuel que n’a pourtant pas notre inoffensif papillon.
Allant jusqu’à imiter le bourdonnement du Frelon par la vibration de ses ailes, Sesia apiformis « joue » réellement à l’hyménoptère piqueur pour avoir la vie sauve.
Classé parmi les hétérocères, mais volant de jour, dans la famille des Sesiidae, ce papillon est en fait un parasite du peuplier ou du tremble.
La femelle pond ses œufs en vol (entre 800 et 1250), largués au pied des trembles, des peupliers ou parfois des saules, tilleuls, frênes ou bouleaux et ce, pendant plusieurs jours vu la quantité d’œufs à disperser. La larve xylophage qui tient visuellement plus du ver blanc que de la chenille classique, sitôt éclose, pénètre dans les grosses racines traçantes ou dans le collet des arbres « hôtes » jusqu’à s’insinuer sous l’écorce du tronc de l’arbre, creusant des galeries dans le bois.
En cas de pullulation, ce zélé insecte ailé pourrait causer des problèmes aux sylviculteurs, mais à nos latitudes, il est relativement peu fréquent, et seuls les jeunes arbres ont à craindre pour leur survie.
Avant la nymphose, et après une vie larvaire de deux, trois années, voire plus, la chenille creuse un trou jusqu’à l’extérieur de l’écorce tout en gardant une fine couche d’écorce prédécoupée, sorte de porte protectrice que le moment venu, la chrysalide poussera pour s’extraire de l’écorce soit à mi-corps, soit totalement en tombant sur le sol. Cette chrysalide protégée pendant sa diapause, dans un cocon situé juste derrière l’écorce, voire carrément enchâssé dans celle-ci prépare ainsi par sa stupéfiante mobilité le terrain pour l’émergence aisée de l’imago. (fait assez peu courant dans le monde des lépidoptères)
A peine sortie de sa chrysalide, en mai ou juin, la femelle de cette Sésie (il y a une cinquantaine d’espèces en France et Belgique) attend sur le tronc de peuplier ou de tremble que passe un mâle qu’elle attire par émission de phéromones pour s’accoupler. La vibration de ses ailes aide sans doute aussi, en plus de la volonté de se faire passer pour un Frelon, à la dispersion de ces « parfums » attractifs que sont les phéromones. L’accouplement peut durer deux heures, et se fait « tête-bêche » à la façon des papillons. La plupart du temps, un mâle, par l’odeur alléché, viendra bien vite mettre fin à l’impatience de la demoiselle. Si les effectifs sont trop peu nombreux, comme en début d’émergences, elle pourra attendre plusieurs jours, voire se déplacer bien que peu mobile, d’un bref et lourd vol zigzaguant un peu comme un insecte ivre, pour trouver une place plus appropriée. Bourdonnant légèrement à la façon d’un vrai Frelon elle se posera très vite sur un autre tronc dans l’environnement tout proche.
En vol, même un naturaliste chevronné pourrait confondre les deux insectes s’il n’a pu observer à son aise auparavant le papillon posé sur son écorce de tremble.
Le dimorphisme sexuel est peu marqué, le mâle étant identique à la femelle, en plus petit et moins « grassouillet » cependant. Son vol est nettement moins hésitant.
Je vous souhaite d’être un jour « saisi » par la vision de cette Sésie car c’est un sympathique et bel insecte qui ne s’observe que trop rarement, tant il a l’art de passer inaperçu, une fois émergé.
jeudi 14 juin 2012