Le Baquet

Le BAQUET

Nouvelle réserve naturelle de Natagora

en Entre-Sambre & Meuse

Le Baquet, voilà bien le nom d’un domaine qui a fait rêver plus d’un naturaliste depuis plusieurs générations.

Situé à cheval sur la dépression famenienne de la Fagne de l’Entre-Sambre-et-Meuse, et sur les coteaux Frasniens qui précèdent les bords de Meuse, entre Doische et Givet, ce site d’exception est un des bijoux de la Wallonie au niveau richesse et diversité biologique. Mélange de biotopes divers tels la forêt de chênes Fagnards, les fruticées d’épineux recolonisant d’anciennes prairies et landes à bruyères, les terrils de schistes provenant des fondations de la ligne de chemin de fer abandonnée, les prés humides à molinie, deux ruisseaux intermittents qui se rejoignent sillonnant la dépression centrale, les lambeaux de landes de callune, les prairies humides à joncs épars, les flanc ensoleillés du RaVel traversant le domaine … Tout est réuni pour y rassembler une faune et une flore devenue rare ailleurs.

Si nous consultons les cartes anciennes existantes, telle celle de Ferraris de 1777 ou les cartes de 1850 ou 1943 en notre possession, nous devons constater qu’une bonne partie de ce site était encore à ces dates, constitué de champs, landes et prairies et qu’à peine un quart de la surface était couverte de forêt. Ces landes, prairies et champs cultivés, qui à cette époque n’étaient pas pollués par une agronomie agressive nous ont laissé des sols intacts de toute pollution agricole, et qui dit sols préservés dit flore et faune très diversifiée.

La déprise agricole de la fin du XIXème siècle et de l’après guerre dans ces sols pauvres qui ne permettait plus aucune rentabilité a favorisé par leur abandon la recolonisation forestière, mais dans ces fruticées claires avec trouées ensoleillées, tout le potentiel floristique et faunistique est encore présent.

Les relevés floristiques de J.Duvigneaux en 1980, ce grand monsieur de la botanique Wallonne, nous fait part de pas moins de dix espèces d’Orchidées relevées sur le site, dont deux très rare et d’une flore d’une richesse exceptionnelle et très variée. Ce site se révèle être en sus un des hauts lieux de l’herpétologie, car nous y trouvons encore nos trois serpents, et trois espèces de lézards différents. Les papillons qui volent sur les pourtours de la forêt, dans les layons restés ouverts, dans les dernières landes à callune, sur les flancs du RaVel sont aussi abondants que variés, avec une espèce phare comme le Damier de la Succise. Les oiseaux forestiers ou de lisières ne sont pas en reste. Y entendre le tambourinement du Pic noir, du Pic Mar, du Pic vert, Epeiche ou Epeichette est permanent. La Cigogne noire, le Grand Corbeau … et bien d’autres volatiles intéressants survolent ces lieux très souvent …, la Huppe fasciée et le Guêpier d’Europe y ont été signalés.

Quand ce site, qui appartenait à la ville française toute proche de Givet, a été acquise par une société immobilière pour en faire un village de vacances avec chalets et caravanes, le monde naturaliste s’est mobilisé pour tenter de le sauver. Grâce à ce combat difficile, de longue haleine, mené sans discontinuer à tous les niveaux, et pendant des décennies, aucune infrastructure de vacances ne fût jamais édifiée sur ce site exceptionnel actuellement majoritairement classé Natura 2000.

Plus de trente années furent nécessaire pour enfin arriver à cet achat qui a réjouit non seulement le milieu naturaliste et notre association, mais tous les riverains qui craignaient de voir cet espace paysager hors du commun, devenir un village de vacances avec toutes les nuisances que cela pouvaient induire pour eux, pour nous et pour la biodiversité. Enfin, après tant d’années d’attente, et avec l’aide de tous nos sympathisants nous allons pouvoir mettre en valeur ce site exceptionnel et sauver toutes ces richesses biologiques qui sont passées à deux doigts de la catastrophe et de l’extinction programmée. Une petite équipe de naturalistes de tous bords, n’est cependant pas restée les bras croisés, et, avec la généreuse autorisation du chasseur local, ce qu’il faut souligner car plutôt rare, ils ont pu gérer depuis les années nonante, avant que le LIFE-Papillons ne prenne la suite en 2009, les dernières ouvertures internes de la forêt qui, sous l’assaut des ligneux pionniers et très dynamiques que sont les prunelliers, les aubépines, les bourdaines et les bouleaux, tendaient à se refermer et à mettre en danger la survie de ses deux espèces phares, dont le Damier de la Succise.

Le LIFE-Papillons a remis en lumière quelques hectares de veilles landes qui constellent encore la forêt pour permettre aux papillons, aux orchidées, à la faune et à la flore de s’y redéployer dans une harmonie retrouvée. Tout est en place pour que ce territoire qui est encore un joyau redevienne un trésor inestimable.

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